Education en primaire – La France progresse dans le classement international ?

Jean-Michel Blanquer : ancien ministre de l'Education Nationale (2017-2022)

Le propos

Dans l’interview au figaro du 9 Septembre 2024, Jean-Michel Blanquer exprime sa fierté quant aux réformes menées lorsqu’il était à la tête de l’Éducation nationale de 2017 à 2022, en particulier le dédoublement des classes en zones prioritaires, qui a touché plus de 400.000 élèves. Il met également en avant le rebond du niveau des élèves de primaire, notamment mesuré par les évaluations PIRLS, qu’il considère comme un succès sous-estimé. Il souligne aussi la mise en place d’évaluations nationales annuelles, permettant un suivi personnalisé des élèves et une meilleure analyse des performances, ainsi que la formation continue des enseignants en français et mathématiques. Il insiste sur l’importance de la méthode syllabique et la nécessité d’exigence dès les premières années d’école, tout en reconnaissant que des défis restent à relever.

Rebond ? Que dit l'étude internationle PIRLS ?

La France à la traîne, des écarts criants avec les pays les plus performants

Les résultats PIRLS 2021 dressent un constat implacable : la France reste loin derrière les pays leaders en matière de compréhension de la lecture chez les élèves de 9-10 ans. Malgré de timides progrès, le fossé avec les meilleurs systèmes éducatifs se creuse. Les chiffres parlent d’eux-mêmes.

Résultats : des écarts qui persistent

En 2021, la France obtient un score moyen de 514 points, légèrement supérieur aux 511 points de 2016, mais ce score la place 34e sur 57 pays, loin derrière les champions dont Singapour, Hong-Kong ou la Russie en trio de tête. Les écarts sont frappants : la France accuse un retard de 53 à 73 points par rapport aux leaders. Ce gouffre illustre l’incapacité du système éducatif français à rivaliser avec les meilleures pratiques pédagogiques.

Comment se situe la France par rapport à l'UE ?

La France se situe au-delà de la moyenne internationale (500 points), mais en deçà de la moyenne européenne (527 points) pour les 17 pays participants. Elle se retrouve par rapport à nos concitoyens européens en queue de peloton très loin derrière la Finlande, la Pologne ou la Suède, alors même que les pays de l’UE décrochent sensiblement dans le classement. En effet, ils affichent en moyenne une baisse statistiquement significative, de 11 points par rapport à 2016, quand la France augmente légèrement son score de 3 points.

Pourquoi un tel écart ?

Deux raisons principales sont avancées : 

1. des méthodes pédagogiques dépassées axées sur la mécanique de la lecture

Les pays en tête, tels que Singapour et la Finlande, adoptent des approches pédagogiques centrées sur la compréhension approfondie et critique des textes, formant leurs élèves à devenir des lecteurs actifs et analytiques. En revanche, la France reste prisonnière d’une approche obsolète, centrée sur la technique du déchiffrage et la compréhension littérale, au détriment des compétences analytiques et critiques.

Cela se reflète dans les pratiques enseignantes :

97% des enseignants français demandent à leurs élèves de retrouver des informations dans un texte (contre 95% dans l’UE). & 92% des enseignants se concentrent sur les idées principales (91% dans l’UE).

Ces activités de base, bien qu’essentielles, ne suffisent plus à former des lecteurs capables de saisir la complexité des textes. Les tâches analytiques, telles que décrire le style ou comparer à des expériences vécues, sont demandées dramatiquement moins fréquemment en France, comme l’indique le tableau suivant.

2. Des Inégalités sociales qui constituent un frein majeur aux performances

La fracture sociale reste béante dans le système éducatif français. L’écart de performance entre élèves de milieux favorisés et défavorisés est l’un des plus élevés parmi les pays développés. Ces inégalités sont amplifiées dans les zones rurales et les quartiers défavorisés, où les résultats sont dramatiquement bas. A Singapour ou en Finlande, les politiques éducatives sont conçues pour réduire ces écarts, tandis que la France peine à mettre en place des solutions efficaces pour niveler les chances de réussite.

Les priorités doivent changer

Les pays les plus performants, comme la Finlande, privilégient des approches basées sur l’autonomie des élèves, la lecture pour le plaisir et une pédagogie plus individualisée. En France, l’approche reste trop rigide, centrée sur la mécanique de la lecture, négligeant les compétences analytiques complexes nécessaires pour comprendre en profondeur un texte.

Le mot de la fin : une course contre la montre pour rattraper le retard

Malgré des réformes comme le dédoublement des classes en zones prioritaires, qui ont permis une légère amélioration des résultats, le système éducatif français est encore loin du compte. Les écarts restent béants, notamment dans les compétences analytiques et la réduction des inégalités sociales. Si la France veut un jour rivaliser avec Singapour, Hong Kong ou la Finlande, elle devra transformer en profondeur ses pratiques pédagogiques, en misant sur une lecture critique et active, et combler les inégalités sociales qui pèsent lourdement sur les performances globales. L’enjeu n’est plus simplement d’apprendre à lire, mais de savoir comprendre et analyser dans un monde de plus en plus complexe.

Les chiffres sont clairs : il est urgent d’agir efficacement et durablement, d’autant que l’on sait comment faire.

FAQ

Qu'est ce que la méthode Syllabique ?

La méthode syllabique est une méthode d’apprentissage de la lecture qui repose sur l’apprentissage des lettres et des sons qu’elles produisent, puis sur leur combinaison pour former des syllabes. L’idée est que l’élève apprenne à déchiffrer les mots en découpant chaque mot en syllabes et en assemblant ces dernières pour comprendre le mot complet.

Principe de la méthode syllabique

  • Apprentissage des lettres : L’enfant commence par apprendre les lettres de l’alphabet et les sons correspondants.
  • Assemblage des sons : Ensuite, il apprend à combiner les lettres pour former des syllabes (comme « ba », « ta », « ri »).
  • Assemblage des syllabes en mots : Les syllabes sont ensuite combinées pour former des mots complets (« ta-ble », « ca-na-ri »).
  • Lecture de phrases : Après avoir acquis la capacité à lire les mots, l’élève passe à la lecture de phrases.

Avantages de la méthode syllabique pour ses partisans :

  • Structure progressive : Elle permet d’apprendre de manière très structurée, étape par étape, en se concentrant d’abord sur les bases du déchiffrage.
  • Renforcement des bases phonétiques : En apprenant chaque lettre et son son, l’élève développe une bonne compréhension du lien entre les lettres et les sons qu’elles produisent.
  • Autonomie dans la lecture : Une fois que l’élève maîtrise l’assemblage des syllabes, il devient capable de lire de nouveaux mots qu’il n’a jamais vus auparavant, simplement en les décomposant.

Controverses


La méthode syllabique est parfois opposée à la méthode globale, qui consiste à apprendre les mots dans leur ensemble, sans passer par le déchiffrage syllabique. La méthode globale est souvent critiquée car elle peut poser des difficultés dans le cas de mots nouveaux ou inconnus. La méthode syllabique, en revanche, est plébiscitée par certains pédagogues et experts pour son efficacité, notamment chez les enfants en difficulté de lecture.

Jean-Michel Blanquer a défendu cette méthode pendant son mandat, la considérant comme supérieure à d’autres approches pour l’apprentissage de la lecture en France.

PIRLS de quoi s'agit-il ?

L’évaluation internationale PIRLS (Progress in International Reading Literacy Study) est une enquête comparative qui évalue les compétences en lecture des élèves de quatrième année du primaire (environ 9-10 ans). Créée par l’Association internationale pour l’évaluation du rendement scolaire (IEA), elle est réalisée tous les cinq ans et examine les capacités de lecture des jeunes enfants dans divers pays à travers le monde.

Objectifs et structure de l’évaluation PIRLS :

Objectifs : L’évaluation PIRLS cherche à comprendre dans quelle mesure les systèmes éducatifs parviennent à enseigner la lecture aux jeunes élèves et à quel point ils sont prêts pour des apprentissages plus avancés. Elle s’intéresse également aux facteurs influençant ces résultats, tels que les méthodes d’enseignement, les ressources scolaires et l’environnement familial.

Compétences évaluées : PIRLS mesure les capacités des élèves à comprendre et à interpréter différents types de textes, principalement des textes narratifs et informatifs. Elle évalue également la capacité à analyser et à évaluer le contenu.

Environnement d’apprentissage : L’étude intègre des questionnaires remplis par les élèves, les enseignants et les parents pour recueillir des informations sur le contexte éducatif et les habitudes de lecture à la maison.

Importance de PIRLS :
Les résultats de PIRLS permettent aux pays de comparer leur performance en lecture avec celle d’autres nations et d’identifier des politiques ou pratiques efficaces pour améliorer l’enseignement de la lecture. Ils offrent des données précieuses pour orienter les réformes éducatives, en particulier dans les premières années de scolarisation, où les compétences en lecture sont essentielles pour la réussite future des élèves.

Les rapports PIRLS influencent les politiques éducatives dans de nombreux pays, car ils fournissent des indicateurs clés sur l’efficacité des systèmes éducatifs.


Pour en savoir plus sur le PIRLS 


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